5 questions qu’on s’est posées à Solidays
Comme chaque année, quelques jours avant de se rendre à Solidays, on s’est posé une myriade de questions sur la prog : l’importance accordée au rap, à l’EDM, la situation de la chanson française, la renaissance du rock français, et surtout, la place du festivalier dans tout ça. Après trois jours au soleil et du son plein les oreilles, on fait le bilan.
Quelle est la place du rap ?
La journée de vendredi s’est ouverte de façon magistrale avec le concert de Georgio. Le public n’a pas boudé l’atypique rappeur de Saint-Denis, qui a lié rap conscient et lyrisme, en évitant insultes ou auto-tune, pourtant quasi-inévitables aujourd’hui dans le milieu du rap. D’ailleurs, l’américain Mac Miller, également très attendu, a eu du mal à rivaliser avec le petit français. Il a servi un plat à peine réchauffé, pour une performance qui ressemblait plus à un service minimum qu’à un show digne d’une telle star américaine… On est sortis déçus de ce concert qui prouve que la trap à outrance ne sauve pas un rap assez pauvre. Autre rappeur attendu sur le festival : Kerry James, qui a offert à Solidays un concert acoustique engagé, à renfort de grandes déclarations. Dimanche, la performance du quatuor américain Flatbush Zombies lui a assuré une bonne place dans notre top des meilleurs concerts de cette édition. Avec une énergie folle, les rappeurs de Detroit ont bercé le public d’un gangsta-rap à l’ancienne sans l’ombre d’un effort. Quant à VALD, ragaillardi par le soutien des rappeurs Fianso et Kalash Criminel, c’est avec humour qu’il a livré une prestation mi-concert mi-sketch, bourrée d’auto-tune assumé, avec beaucoup d’autodérision.
Le rock made in France est-il toujours en vie ?
C’était notre grosse interrogation au vu de la programmation. Mais après coup, on peut confirmer que le rock n’a pas dit son dernier mot. Déjà parce qu’une bataille de guitare a eu lieu sur le festival : deux groupes issus des cendres de Skip the Use se sont affrontés. Un combat qui s’est ouvert avec la performance de The Noface vendredi, pas franchement mémorable. Dimanche, c’est Matt Bastard himself qui a pris la relève, histoire de bien rappeler à tout le monde le coté punk de ses précédents groupes. La encore, on est pas franchement convaincus. Au final, les chances de survies du rock français pourraient bien reposer sur les épaules de Last Train, qui n’a pas boudé son plaisir en envoyant ses riffs de guitares sous les cris de son chanteur, sous les étoiles du chapiteau.
Que devient la chanson française ?
L’un des meilleurs moments du festival était sans conteste le concert de La Femme dont on attendait beaucoup. Mi-punk, mi variet’, le groupe saisit par un érotisme affiché et clairement revendiqué mais aussi par une forme d’ésotérisme qui donne au concert un air de rite païen. Le public semble conquis, reprenant en braillant les paroles des titres des chansons, dansant avec une énergie d’abord discrète et chaotique avant de prendre la forme d’une gigantesque étreinte. Venus par curiosité, on repart enchantés. C’est peut-être justement ça, la nouvelle chanson française : un mélange de style et de genre qui offre une seconde jeunesse à la langue. Mai Lan l’a bien compris. Entreprenante, elle offre au public un show aérien rythmé par quelques moments bien sentis, l’occasion pour le public de virer dans une forme de folie douce. Octave Noire, quant à lui, a joué de malchance en affrontant Brocken Back, mais le public présent à quand même pu partager la transe acoustique du groupe, pour un résultat solaire, loin de la mélancolie des morceaux.
L’EDM est-il en train de conquérir la France ?
Niveau électro, on pensait les français bien éduqué. Depuis la french touch, le retour des Daft Punk et de Justice, ainsi que l’apparition d’une nouvelle scène (Fakear, Superpoze,..) on se pensait même carrément immunisés contre le mainstream des courants électroniques américains. Et pourtant, Solidays nous a prouvé le contraire. En raison de la présence du pape de l’EDM, Diplo, déjà. Si ses performances folles peuvent prêter à sourire, il n’avait pas laissé la même impression lors de ses précédents voyages en France. C’est cependant sans pincette et à renfort de canons à paillettes qu’il a joué ce dimanche, si bien que les néophytes étaient un peu surpris (« c’est lui qui a joué tout ça ? », s’interroge-t-on par exemple sur un sample de Tove Lo). Une performance en tous les cas bien plus accessible que les sets de Joris Delacroix ou Boris Breja (pourtant si beau).
Jusqu’où peut aller la détermination d’un festivalier ?
Cette année, il fallait faire avec la canicule, mais le festival a réservé quelques surprises pour pallier au manque d’ombre. Si les points d’eau ont été globalement pris d’assaut (et ont très clairement manqué), l’attente au bar n’a pas joué en faveur des festivaliers assoiffés. Pourtant, des coins de paradis s’offraient aux visiteurs curieux. La guinguette placée dans un coin non visible du festival a offert un répit calme et ombragé pour une ambiance magique. Décorée avec soin et pleine de mobilier permettant de se poser, on pouvait au choix jouer au ping-pong où écouter des concerts acoustiques guitare-voix. Un plaisir en forme de secret tant l’endroit était peu peuplé !
Rédactrice: Tiphaine Lachaise // Photographe: Robert Gil