Rencontre // Girlpool

 Rencontre // Girlpool

alice baxley (Facebook) girlpool

Elles ont dix-neuf ans, la franchise de la jeunesse et les cheveux en pagaille. Roux et courts pour Cléo Tucker, verts pour Harmony Dividad. Les deux punkettes américaines de Girlpool présentent leur très attendu premier album  Before the world was big  chez  Wichita Recordings. Une petite bombe aux titres concis et brillants. Nous les avons rencontrées dans un bistrot parisien avant leur concert au Point éphémère, entre une salade de radis et un plat… non identifié.

On va commencer par une question super classique : comment vous vous êtes rencontrées ?

Harmony : On s’est connues à un festival de DIY à Los Angeles. On donnait toutes les deux des concerts là-bas, on y passait du temps avec des amis et on trainait pas mal dans cette ambiance un peu punk. Ça s’est fait comme ça.

Cleo : En fait, quand on parle de DIY, on le dit dans le sens de DIY punk. C’est-à-dire organiser nos propres spectacles dans un espace de liberté, avec une communauté ouverte

Harmony : Tout ça s’est passé il y a deux ans.

Comment vous avez monté Girlpool ? Vous avez tout lâché pour vous lancer dans la musique ?

Harmony : On était toutes les deux à l’école et on sentait que l’apprentissage était quelque chose d’important mais on était trop excitées à l’idée de faire de la musique. Pour nous, ce n’était pas productif d’être dans un environnement d’enseignement classique.

Cleo : Nos parents nous voyaient tous les jours aller à des concerts et jouer de la musique après l’école. Quand j’étais chez moi, tout ce que je faisais c’était m’enfermer dans ma chambre et jouer de la guitare. Donc ça n’a pas été une surprise pour eux. Et on a eu de la chance parce qu’ils nous ont vraiment soutenues.

Il n’y a pas de batterie dans le groupe. Une raison qui explique ce choix ?

Harmony : On voulait vraiment se concentrer sur les paroles pour aller droit au but. On a aussi voulu prendre le temps d’explorer le sens vers lequel on voulait aller. Aujourd’hui, on essaye de trouver les mots qui correspondent aux émotions qu’on veut partager. On en parle et on essaye de faire naître une idée. C’est comme si on avait des pieds de deux tailles différentes et qu’on trouvait la paire de chaussures qui nous va bien à toutes les deux. C’est vraiment beau de pouvoir exprimer ce qu’on ressent de cette façon. C’était donc naturel qu’on fasse ce projet à deux.

Vous dîtes dans plusieurs interviews que vous n’aimez pas qu’on colle une interprétation à vos chansons alors je vous laisse faire le travail : de quoi parlent-elles ?

Cleo : L’interprétation est vraiment un aspect cool de la création, du fait de concevoir des choses. Ça peut être quelque chose de très puissant. Je pense que c’est une des choses les plus étranges mais aussi les plus cool quand tu fais de l’art. Parce que tu sais, je ne m’identifie pas au premier abord à une personne que je ne connais pas. Donc je trouve ça vraiment cool que ça puisse se produire, que ça existe. Notre intention, c’est de créer d’une manière qui nous semble honnête à toutes les deux. Quelque chose qui fasse que tu te sentes bien, qui soit puissant et honnête.

Vous avez des thèmes de prédilection ?

Harmony : On n’a pas vraiment de carnet de bord. On parle des sentiments qu’on a pu ressentir à certaines périodes. On n’y pense pas forcément avant, on ne se dit pas : « Tiens, on va parler de telle ou telle chose ». On essaye d’écrire de la façon la plus naturelle qui soit.

C’est comme si on avait des pieds de deux tailles différentes et qu’on trouvait la paire de chaussures qui nous va bien à toutes les deux.


Girlpool est souvent associé au mouvement Grrl Riot : vous êtes d’accord avec ça ?

Cleo : Je ne suis pas sûre qu’il faille être aussi précis. On n’a pas un seul projet, on incarne plusieurs choses. Personnellement, je ne m’identifie pas à un groupe aussi spécifique. On veut avoir de l’espace, de la liberté.

Harmony : L’idée, c’est de conserver le plus de latitude possible. On veut juste être nous-mêmes et ne pas avoir l’impression qu’on nous colle une étiquette. On ne veut pas avoir une seule influence, ce serait vraiment flippant.

Mais pourtant le nom « Girlpool » est un clin d’œil, non ?

Cleo : Si vous saviez comment on l’a choisi… On cherchait un nom pour le groupe. Un jour, une amie m’a appelée. Elle était en train de lire un roman de science-fiction, Cat’s Craddle (NDLR : « Le berceau du chat » de Kurt Vonnegut). Un des chapitres s’appelle « Girlpool ». Elle nous a appelées pour nous dire : « J’ai trouvé un nom super cool pour votre groupe ». Et voilà !

Vous chantez toujours à l’unisson ou en harmonie. Le groupe a donc deux chanteuses. Comment vous travaillez sur les paroles ?

Cleo : On écrit toujours ensemble. On s’assoie. On médite sur une émotion ou une pensée. On essaye de trouver les mots qui nous font nous sentir proches de cette émotion. C’est comme une exploration intense de nous-mêmes et des autres. Parfois, ça nous prend beaucoup de temps. On fait tout à deux.

Vous n’apparaissez jamais sur vos jaquettes et elles sont toutes illustrées mais dans des styles très différents. Comment vous les choisissez ?

Harmony : Jusqu’à aujourd’hui, on s’est servi d’illustrations que des amis ont faites. Ça s’est fait de façon très naturelle, on n’avait pas de pré-requis. C’est juste venu comme ça.

Cleo : Elles sont dans des styles très différents et ça illustre bien nos intentions dans ce projet. Nous avons des envies et des intentions qui évoluent. On ne veut pas sentir qu’on uniformise tout. La pochette de Before the world was big a été faite par une de nos amies très proche. On regardait sur quoi elle était en train de travailler et on a adoré ce dessin. On lui a tout juste demandé si on pouvait s’en servir.

Après votre tournée, qu’est-ce que vous comptez faire ?

Cleo : A la fin de cette tournée en Europe, on a prévu une grosse tournée aux USA. Après, on va abandonner ce style de vie très bizarre pour redevenir des êtres humains normaux.

Harmony : On va juste continuer à être ensemble. On verra ce qui va se passer.

J’ai vu vos vidéos sur Instagram et aussi sur Vine…

Cleo : Quoi ? Vous avez vu mes Vines ? (Rires) Mais c’est génial ! High Five !

Vous prévoyez de vous en servir dans un prochain clip ? Parce qu’ils sont vraiment marrants ! Mention spéciale au chien avec une tête de pigeon.

Harmony (explose de rire) : Tu vois Cléo, tu es drôle !

Cleo : C’est hyper flatteur ! (Rires) Je n’en reviens pas que vous les ayez regardées ! Ça me rend super heureuse de parler de ça. J’adore Vine, j’adore faire des vidéos. Je pense que c’est tellement cool comme outil. Le principe, c’est d’attraper des petites choses du quotidien. Vous savez qu’une de mes vidéos est devenue virale une fois ! Il faut absolument que je vous la montre ! C’est une vidéo qui se passe en Italie. Un mec dansait tout seul et a bousculé une petite fille sans faire exprès (NDLR : la vidéo a fait plus de 3 millions de boucles et a été repartagée 21.000 fois). Je ne sais pas si on s’en servira un jour mais ce serait génial.

Qu’est-ce que vous écoutez en ce moment ?
Harmony : Tame Impala. En boucle. Cléo est une énorme fan.

Propos recueillis par Kim Biegatch // Photographie: Image Facebook par Alice Baxley

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