Møme : Escapade à Bali
Après plusieurs mois de composition et de tournée en support de Gramatik aux États-Unis, Møme sortira en 2019 son nouvel album. Pressé de dévoiler de nouveaux morceaux à son public, le Niçois a choisi de publier en amont un triptyque de courts EPs, débuté en juin dernier avec Møment I. Le concept : voyager plus afin de provoquer l’inspiration et se donner le temps de composer ses nouveaux titres. On l’a rencontré au retour de son voyage à Bali, quelques jours après la sortie du premier volet de sa trilogie, sur lequel figurent les titres When We Ride et Canggu. Il nous a parlé de cette expérience de voyage qui lui a permis de retrouver la fraîcheur et l’envie de composer.
Peux-tu me présenter ton nouveau projet Møment ?
Møme: L’idée est de publier avant la sortie de mon prochain album plusieurs « Møments» que je composerai autour du monde. J’ai sorti le premier, que j’ai composé à Bali en Indonésie, il y a 10 jours à peu près. Des Balinais que j’ai rencontrés sur place ont contribué au clip que j’ai tourné là-bas. Je vais continuer jusqu’à la fin de l’année à beaucoup voyager pour créer mes deux autres Møments. Demain, je pars au Mexique, puis je reviendrai ensuite en France avant de repartir au Canada et aux Etats-Unis.
A chaque fois, je me déplace pour des dates de concert et en fait je reste un peu plus longtemps pour faire du studio avec des gens ou composer chez des personnes avec qui je collabore. J’ai donc pas mal de voyages de prévus pour l’instant et d’autres vont encore arriver. Je pars en Tunisie aussi, en Nouvelle-Calédonie, en Norvège…. Je ne peux pas te dire aujourd’hui où Møments II et III seront produits, car je n’en sais rien encore, ça se fera de manière spontanée.
Pourquoi as-tu choisi la forme d’un triptyque ?
Møme: Je me suis dit que c’était un objectif réalisable, parce que ça me demandait de sortir 6 titres. Autant il peut m’arriver de composer des titres très vite, autant parfois, je peux aussi mettre des mois et des mois pour finir un morceau. Je savais que cette année j’allais faire un bon nombre de voyages et publier 3 EPs de deux titres avant de sortir mon album, ça me semblait jouable sur une année. Mes voyages me donnent beaucoup d’inspiration en ce moment et comme j’ai moins de dates cette année, ça me permet de prendre le temps de composer. Comme c’est spontané, j’ai plein d’idées et d’envies.
C’est ça qui est dur aujourd’hui en tant qu’artiste : faire sa musique et pouvoir la sortir assez rapidement. Comme je suis signé à moitié en major, les process sont très longs, on doit parfois attendre des mois et des mois de préparation marketing avant de sortir un titre sur les plateformes. Avec ce nouveau projet, je court-circuite un peu tout ça. Bien sûr, il y a toujours toute cette préparation en background, mais au moins, quand ma musique sortira, je serai encore en adéquation avec elle. C’est très dur de sortir des titres qu’après tu n’assumes plus vraiment. Ce soir, par exemple (à Solidays, ndlr) je vais jouer des titres qui ont déjà 2 ou 3 ans et c’est difficile, surtout quand ce ne sont pas forcément des tubes ou des musiques que les gens connaissent… au bout d’un moment, ca y est tu as épuisé l’énergie que tu voulais donner, ta musique ne t’appartient plus, c’est le moment de passer à autre chose.
« A Bali, certains endroits sont vraiment invivables car beaucoup trop touristiques. Mais il y a également des lieux uniques où tout le monde vit en adéquation »
Møment I évoque l’Indonésie et plus particulièrement Bali. Quels sont tes souvenirs les plus marquants là-bas et comment ont-ils influencé ta musique ?
Møme: Il y en a plein ! J’ai tourné une live session au pied du Mont Agung, qui est un des plus gros volcans de l’île de Bali. Il est entré en éruption il y a six mois, alors que j’étais sur place avec ma femme. Tout a été évacué par sécurité et énormément de Balinais se sont retrouvés sans foyer. Le contraste était ultra marquant avec l’activité touristique. Je trouve que c’était super fort. Du coup, j’ai écourté mon voyage, avant de revenir un peu plus tard tourner la session autour de ce mont, parce que j’y avais vécu ce moment.
J’ai aussi été marqué par les rencontres que j’ai faites là-bas, comme celle avec Flora Christin, la première longboardeuse pro indonésienne (qui apparaît avec son surf dans le clip de When We Ride, ndlr). Il y a aussi Agatha Sahell, l’une des actrices avec lesquelles j’ai tourné le clip. Les gens en général sont ultra accueillants. C’est assez dépaysant et en même temps il y a ce mélange de population avec les Australiens qui envahissent un peu Bali. Certains endroits sont vraiment invivables car beaucoup trop touristiques. Mais il y a également des lieux uniques où tout le monde vit en adéquation : ce sont mes lieux préférés, où il y a un équilibre entre le confort occidental et le mode de vie local. J’y ai rencontré des gens géniaux, de niveaux de vie très différents, que ce soit des instagrammeurs connus ou des locaux dans les rizières.
Qui est JPL qui chante sur When We Ride, comment s’est faite cette rencontre ?
Møme: En fait, il y a deux ans, j’ai rencontré un groupe australien qui s’appelle Tora que j’ai surkiffé. Je les connais tous dans le groupe et c’était vraiment un objectif de faire de la musique avec eux. Sauf qu’entre temps, ils se sont plus ou moins séparés et j’étais un peu deg… Mais je suis resté en contact avec JPL (Johan Loewenthal, ndlr), l’un des chanteurs du groupe, qui vit aujourd’hui en Angleterre mais bouge pas mal et a accepté de chanter sur When We Ride.
Canggu, c’est ton autre point de chute à Bali, qui donne son nom à l’un de tes morceaux. Dans quel état d’esprit tu te trouvais là-bas ?
Møme: Le tourisme se développe beaucoup sur l’île et même s’il reste un village plus ou moins préservé, Canggu a beaucoup changé en l’espace de six mois et je pense que ça ne va faire qu’évoluer. Il y a de l’argent à se faire et donc aucune raison que ça ne devienne pas ultra touristique dans 20 ans. C’était génial, je serai bien resté plus longtemps. C’était détente, même si ce n’était pas des vacances. On se levait tôt et on se couchait tard pour filmer les meilleurs moments pour le clip, avec les meilleures lumières, tout en essayant de ne pas dormir debout quand tu te tapes trois heures de trafic en scooter sur des routes bondées pas adaptées au monde qu’il y a.
J’ai ressenti une certaine sérénité au moment où j’ai créé cette musique : l’inspiration me vient quand je ne suis pas sous pression, qu’on ne me demande pas de sortir un titre demain, qu’on ne m’oblige pas à faire certains trucs. On demande souvent aux artistes de forcer les choses, mais quand tu fais ça tu perds ta nature. Canggu, c’est exactement ce que j’aime, mais ce n’est pas non plus au goût de tout le monde : c’est de la musique plus indé, il n’y a pas de voix, car il n’y a pas besoin de mots pour créer ça.
La playlist de Møme
« Quand j’aime une musique je peux l’écouter 300 fois c’est horrible ! Si je vais faire du sport, je vais écouter la même musique en boucle pendant une heure, ça me met dedans, j’adore. » (Møme)
Dux f. Stan Carrizosa – Future
Gibbz – Stay For a While
Tom Misch – Lost in Paris
Two another – The night
David West & Ida Engberg – Abataka
Propos recueillis par Aurélie Tournois // Photographe: Céline Non